Varanasi est probablement la ville la plus spirituelle de l’Inde. À ses pieds coule le légendaire Gange dans lequel les pèlerins viennent célébrer à la fois la vie et la mort. Prendre le temps de marcher sur les ghats (les marches qui bordent le Gange) permet d’observer l’intensité de la vocation des hindous. Difficile de rester indifférent devant toute l’action qui s’y passe…!
Dès les petites heures du matin, les hindous se dirigent dans le Gange pour se laver, se baigner, prier, faire la lessive, laver les buffles, pêcher, se raser et même se brosser les dents. Pendant qu’un sage se recueille, un enfant barbotte dans sa tripe. Pendant qu’une dame dépose une offrande, un homme à deux pas d’elle lave ses bobettes. Et c’est comme ça chaque matin depuis des millénaires.
Mais pourquoi donc vouloir observer toute cette activité? Parce que c’est beau! Les femmes qui viennent se recueillir arborent leurs plus belles parures et leurs bijoux les plus flamboyants. Les sâdhus avec leurs longues barbes de grands-papas et leurs habits orangés viennent s’y rassembler pour méditer. Certains pratiquent leurs positions de yoga au travers des enfants qui font une partie de cricket. Ajoutez à toute cette action le décor d’une des villes les plus anciennes du monde et les odeurs d’encens, d’offrandes de fleurs et de chaï qui mijote et vous obtenez une ambiance magnifique.
Bien qu’à Varanasi on célèbre la vie, c’est également à cet endroit qu’on y célèbre la mort. Sur les rives du Gange se trouvent trois sites de crémation où on y brûle les corps des défunts 24 heures par jour. Le tout est à la vue de tous. Libre au « spectateur » de décider s’il veut regarder ou « changer de chaîne ». Les proches du mort nettoient d’abord le corps dans le fleuve sacré et le mettent ensuite au bûcher pour un dernier au revoir.
Et que fait-on avec les cendres du défunt une fois qu’il est consumé? On les répand dans le Gange bien sûr! Eh oui, dans le même fleuve où on s’y lave, s’y baigne et s’y brosse les dents. Les gens s’adonnent donc à leurs activités nautiques préférées tout juste à côté des ghats de crémation.
Ici, cendres et corps se côtoient, la vie et la mort sont en symbiose. Pour les Occidentaux, c’est une surprenante mise en scène. Pour les hindous, c’est leur quotidien.
Varanasi n’est pas une ville pour les cœurs sensibles. On sent que le trépas y est omniprésent. Les gens viennent ici pour y mourir, c’est leur souhait. Difficile d’exprimer ce qu’on ressent en observant les cérémonies de crémation. On est déchiré entre le voyeurisme et le respect du défunt.
Et que dire de l’odeur de consumation qui s’imprègne dans nos vêtements après avoir traversé le site du brasier. Heureusement, les ghats grouillent de vie tout autour. C’est une explosion de couleur et d’action. Le mélange de tous ces éléments crée un chaos fort joli. Varanasi, tu es belle, tu es intense. Tu es venue me chercher dans les tripes. Voilà pourquoi je t’aime autant Varanasi.
Petites anecdotes par rapport aux Indiens que tu rencontreras à Varanasi
Pendant que tu t’émerveilleras devant toute la beauté de Varanasi, un premier Indien viendra à ta rencontre et te dira LA phrase classique dite pour l’homo sapiens de peau blanche de passage: (imaginez ici l’accent indien) « Hello my friend, which country? ».
Bien sûr, la première journée tu répondras la réponse exacte à cette question, mais tu te rendras vite compte que cela fera débuter une conversation dont la seule issue est d’aller dans le magasin de l’Indien. Tu te rendras compte aussi que même si tu lui dis que tu viens de Papouasie Nouvelle-Guinée, il continuera tout de même sa cassette de questions. Parfois, il utilisera des variantes de cette phrase comme par exemple « yes please come » ou tout simplement « yes please », mais tu comprendras assez rapidement que le but est le même.
Comme tu entendras cette cassette à longueur de journée, cela deviendra ta trame sonore pour les prochains jours. Malheureusement pour toi, le DJ indien ne changera pas la mélodie, donc aussi bien t’y faire.
Le deuxième Indien que tu croiseras te klaxonnera de son tuk tuk et te demandera « need transport ?». À ce moment, rappelle-toi que si tu négocies un transport en Inde, tu le feras avant, pendant et après ta course. Et même si tu négocies férocement, tu finiras toujours par payer le double de ce qu’un Indien paiera…
Pendant ton trajet, la conversation que tu auras avec ton chauffeur ressemblera à ceci : « Want to stop in a shop on the way? » No. « Where you go is real far, need to pay extra. » No. « The road is closed, there is a ceremony today, have to go somewhere else. » No. « Give me more tip » No.
Le prochain Indien qui t’interpellera sera possiblement un enfant qui a besoin d’une nouvelle balle de cricket. Jouer à ce sport sur les ghats de Varanasi comporte sa part de risque, dont celui de voir sa balle se retrouver au fond du Gange bien sûr. Il se pourrait que tu sois plus tenté de lui acheter une nouvelle balle que d’aller chercher l’ancienne où elle gît maintenant…
Le quatrième Indien que tu croiseras te proposera peut-être un thé. Tu le remarqueras quand il te dira le refrain suivant : « chaï chaï chaï ». À ce moment, il se pourrait que tu te laisses tenter.
Le chaï indien est tout simplement magique. Mélange de thé noir, d’épices et de lait, il est extrêmement savoureux. Peu importe où tu le boiras, même dans le boui-boui le plus miteux, tu t’en délecteras toujours. En plus, à 10 roupies le thé (25 cents), ça te détendra et ça te redonnera un peu de courage pour affronter la conversation que tu auras avec le 5ème Indien.
Le cinquième Indien t’offrira ses services de guide pour te faire visiter tout de Varanasi.
Le suivant voudra te vendre son « real pashmina ».
Un autre t’agrippera le bras et commencera à te masser.
Une famille t’arrêtera pour se faire prendre en photo avec toi (un par un bien sûr). Le prochain, barbier celui-là, sous-entendra que ta barbe a besoin d’une petite retouche.
Sans oublier les 10ème, 11ème, 12ème et 13ème qui viendront t’offrir toutes sortes de babioles à acheter…
À ce moment de ta journée, tu prendras probablement un long soupir pour faire baisser la pression… Tu te rappelleras que ta journée n’est pas encore terminée et que le DJ indien te promet encore ses plus grands succès tels « Hello my friend », « which country » « please come » et son hit « yes please ».
C’est vrai que tu auras beaucoup d’attention de la part des Indiens à Varanasi, mais ce n’est pas si pire sincèrement. Il faut simplement le prendre avec un peu d’humour et rester zen (c’est parfois un peu difficile à faire, mais on y arrive!).
Si tu passes par-dessus l’engouement des vendeurs pour toi, tu seras grandement récompensé. L’intensité de la vocation des Indiens pour cette ville et son fleuve te donnera beaucoup d’émotions!
Trucs et conseils pour Varanasi:
- Soyez matinal! C’est à ce moment que l’activité spirituelle est à son apogée. De plus, c’est au matin que la lumière est la plus jolie. Avec toute l’action qui s’y passe, vous prendrez certainement les meilleures photos de votre voyage en Inde.
- Faites la « croisière » en bateau au lever du soleil. La vue de Varanasi et des pèlerins qui accourent au Gange à partir de l’eau est la plus belle.
- Ne manquez pas les pujas le matin au Ghat Assi et le soir au Ghat Dashashwamedh (une puja est un rite d’offrande et d’adoration). Bien que très touristique, l’atmosphère qui émane des pujas est festive et chaleureuse.
- Vous sentez que vous avez fait le tour de Varanasi et vous ne savez plus quoi faire? Profitez-en pour faire un cours de sitar ou de tablas. Il y a d’excellentes écoles de musique sur place.
- Vous en voulez plus sur l’Inde? Consultez mon épopée de mon exploration du Zanskar au Ladakh (dans le nord de l’Inde): la grande traversée du Zanskar.